Le tour du Pic du Midi d'Ossau, une randonnée sur les traces des bergers | La Balaguère

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La vallée d'Ossau, pleine de vie

Durant la randonnée Tour du Pic du Midi d'Ossau, pays des lacs et des bergers, aucun jour ne se passera sans voir une cabane de berger, entendre le tintement des sonnailles (on ne dit pas cloches) ou tomber nez à nez avec un troupeau de brebis sous la garde d’un patou.


Dans les vallées d’Aspe et d’Ossau le pastoralisme transhumant traditionnel est extrêmement vivace. Ses racines remontent au néolithique comme le prouvent de nombreuses recherches en cours. Au hasard de la rando, vous pourrez assister à la traite, à la fabrication du fromage et même en acheter directement du producteur au consommateur. D’avis d’expert, le fromage fabriqué dans les cabanes en Aspe et Ossau serait le meilleur des Pyrénées.

Pour le plaisir des yeux, l’eau est omniprésente. Ici les rivières appelées gaves se déversent de lac en lac. Certains comme Estaens ou les lacs d'Ayous sont de véritables icônes.

Le déroulement de notre circuit

La diversité écologique de la vallée d'Ossau

La première journée de cette randonnée n’est pas une simple mise en jambe. Elle remonte le Val de Copen espace naturel classé pour son étonnante diversité écologique. Plus de 400 plantes y ont été recensée dont un grand nombre d’endémiques parfois rares et protégées comme l’Œillet superbe.


Plus haut dans la forêt d’Anitch, des indices donnent à penser que la grande noctule y serait présente mais rien n’est moins sûr. Cette chauve souris, la plus grande d’Europe avoisine le demi mètre d’envergure. Aucune crainte, elle est arboricole et d’une discrétion de violette.

Des paysages extraordinaires de montagnes

Arrivé sur les crêtes d’Ourtasse, c’est le choc. Le cirque de Lescun apparaît subitement au milieu d’un vaste amphithéâtre dont le village occupe le centre. Un rapide tour d’horizon permet de voir d’avance toute la randonnée.


De droite à gauche la pyramide du pic d’Anie où les Basques situent la demeure de Jaunagorri, le seigneur rouge. Viennent ensuite les petit et grand Billare, les célébrissimes aiguilles d’Ansabère, la Table des Rois point de rencontre des anciens royaumes de Béarn, de Navarre et d’Aragon.

En face quelque part sur la derrière la crête frontière, le refuge d’Arlet est caché au regard  par le pic de Labigouer.  A l’extrême gauche pointant discrètement son nez, le pic du midi d’Ossau.

Une randonnée itinérante de gites en refuges

Une fois installé au gite, une visite de Lescun s’impose comme une évidence. Confortablement installé en soulane, le village fait bloc. Une seule rue porte une plaque. Elle est dédiée à Henri Barrio, dit Coucou (1912 – 1969). Instituteur de son état et pyrénéiste hors norme auteur de nombreuses premières. Créateur du refuge de Labérouat en vallée d'Aspe, il consacrera sa vie à faire partager aux enfants son amour de la montagne et des Pyrénées.


L’objectif du deuxième jour est de rejoindre le refuge d’Arlet par le col de Pau. Un court transfert en voiture vous conduira aux portes du parc national. L’itinéraire emprunte une bretelle du chemin de Saint jacques de Compostelle, alternative à la via Tolosa passant par le Somport.
De nombreux pèlerins préféraient passer par ici pour rejoindre la Collégiale romane de Siresa en vallée d'Hecho. C’est également au col de Pau que l’on rejoint la HRP (haute randonnée pyrénéenne) en provenance d’Ansabère et de la Pierre Saint Martin.


La suite de la journée se déroule sur un bon sentier longeant au plus près la crête frontière. Elle est constellées de curieux rochers rouges témoins de l’ancienne chaîne hercynienne d’avant les Pyrénées actuelles. Leur formation s’est faite dans une mer chaude et calme où prédominaient des récifs coralliens analogues à la grande barrière  de corail en Australie.


Le pic de Burcq réalisé au passage, donne à voir un superbe coup d’œil sur les « Sierras extérieures », longue chaîne calcaire aux allures de Dolomites. Nous en sommes séparés par la profonde vallée d’Aguas Tortas remarquable par sa platitude et les méandres du rio Aragon.


Puis c’est l’arrivée au refuge d’Arlet dominant en balcon la profonde vallée de Belonce. Au bord d’un lac entouré de pâturages, il offre un paysage des plus apaisant. L’herbe moelleuse invite à la sieste. On ne peut rêver meilleur endroit pour passer une nuit, en pleine montagne.


Après cette halte réparatrice, il nous faut rejoindre le col du Somport et Candanchu notre prochaine étape. Une longue descente sans difficulté suivie d’une courte montée nous mènera au lac d’Estaens, appelé par les aragonais « Ibón de la mujer muerta » littéralement le lac de la femme morte.


Une légende raconte qu’en lieu et place du lac existaient autrefois un opulent pâturage et de nombreuses cabanes de berger. Un mendiant de passage se présente. Dieu ou le diable, nul ne sait ! L’hospitalité lui étant refusée, l’inconnu se venge sauvagement en engloutissant tout ce méchant monde sauf un qui puisse le raconter à la postérité.


La suite de l’itinéraire jusqu’au Somport emprunte le GR11 et la « Senda de Camille », nommée ainsi en hommage à l’ours Camille dont le territoire s’étendait entre les vallées d’Aspe et de Hécho.


Aux abords du Somport le chemin suit la crête, jalonnée de bornes frontières et de panneaux avertissant le randonneur qu’il est en zone de protection du Coq de Bruyère. Le Somport, anciennement Summus Portus est un lieu de passage fréquenté depuis les romains (via Tolosa) puis par les pèlerins de Compostelle. Ils faisaient étape à l’hôpital de Sainte Christine aujourd’hui en ruines. Aussi important que Roncevaux, il n’a pas survécu à  conversion du Béarn au protestantisme en 1569.


Créée en 1928, Candanchú littéralement le « champ des anges » est la plus vieille  station de ski d’Espagne. Elle est réputée pour la difficulté de ses pistes noires et son ancienne École Militaire de Montagne espagnole aujourd’hui désaffectée.


Le lendemain, un court transfert coté espagnol nous déposera à Astun (prononcer astoun) sous le col des moines que nous rejoindrons par courte montée. Le nom du col est sans équivoque. Autrefois passait ici un chemin de Compostelle appelé Cami dou Segnou, littéralement chemin du seigneur en béarnais. C’était une bretelle du chemin de Piémont qui remontait la vallée d’Ossau par Gabas et Bious Artigues.


Par un beau parcours de crêtes nous rejoindrons le refuge de Pombie au pied de la face sud du pic du Midi d’Ossau. Affectueusement surnommé « Jean Pierre » par les pyrénéistes, ou plus simplement le Pic par les gens du coin, c’est un très vieux volcan qui aurait explosé à l’ère primaire.

Le refuge de Pombie est le point de départ de la voie normale de l’Ossau, mais aussi un camp de base pour attaquer la face sud où se trouvent les plus belles voies d’escalade des Pyrénées. Ici tout le monde parle pitons cordes et autres jargon incompréhensible aux non initiés. Le cliquetis de la « quincaille » emplit le refuge.


Le lendemain changement de décor. Plusieurs possibilités permettent de se rendre au refuge d’Ayous. La plus directe passe par le col de Peyreget. Le refuge d’Ayous apparaît dans le lointain. Pour l’atteindre il faut longer la base du pic du midi d’Ossau puis traverser d’immenses pâturages jalonnés de nombreuses cabanes de berger.


Le tintement des sonnailles, à ne pas confondre avec des cloches résonne à tout va. Le refuge d’Ayous a des airs de déjà vu. C’est le frère jumeau d’Arlet.
Croisons les doigts pour que le beau temps soit au rendez-vous. Il ne faut pas rater le coucher de soleil sur l’Ossau se mirant dans les lacs d’Ayous. Tout simplement magique !


Le lendemain départ à la fraîche pour le pic d’Ayous.

La montée facile emprunte à rebrousse poil le GR10. Du sommet, on peut revoir tout le parcours effectué dans la semaine. Après s’être arraché à la contemplation, il ne reste plus qu’à dévaler la longue vallée de la Baigt de Sencours au fond de laquelle nous attend le chemin de la mature.


Aucune crainte à avoir. Certains ouvrages jouant à se faire peur, le décrivent comme dangereux. Aucune raison de s’angoisser, le chemin devait permettre le passage d’un attelage de bœufs tirant des charrois chargés de longs fûts de sapin.


Une fois engagé, le vide n’est pas apparent sauf à faire turbiner plein pot son imagination.

Tout en bas, le sinistre fort du Portalet, mérite une explication. Louis Philippe décide sa construction en 1842 avec mission de défendre la frontière contre une possible invasion espagnole. On ne se méfie jamais assez de ses voisins ! Après avoir servi de prison politique, le fort du Portalet est transformé en colonie de vacances. Charmant endroit pour des gamins ! S’ensuit une période d’abandon, puis la renaissance grâce au tourisme.


Dernière nuit à Accous au gite Cyprien Despourrins dont le nom honore la mémoire d’un poète occitan né à Accous en 1698. Célèbre, il vient s’établir prés d’Argelès- Gazost au château de Miramont devenu depuis propriété et dernière demeure de Jacques Chancel.


Voir aussi : Tour de l'Ossau en liberté
Toutes nos randonnées dans le Béarn, dans la vallée d'Aspe et d'Ossau.

Un article de Gérard Caubet