Avant de choisir des chaussures, la première question à se poser est celle de sa pratique réelle ou rêvée. Marchez-vous sur des terrains accidentés avec ou sans sentier ou plutôt sur des chemins dument balisés et entretenus ? Partirez-vous en séjour étoile, en petites balades à la journée, ou sur une randonnée itinérante de plusieurs jours où le confort de la chaussure prédomine tous les autres choix ?@
Un bon moyen est de se remémorer quelques randos et fouiller la boite à souvenir compartiment chaussures. Êtes-vous sujet aux ampoules, sur quelle partie du pied, avez-vous mal en descente ? La liste est longue, mais en général le randonneur, marqué dans sa chair, s’en souvient !
Les bons critères pour choisir ses chaussures de randonnée
Primo : la sécurité
En matière de sécurité, il est primordial d’être bien chaussé. En cas d’accident (ce que je ne vous souhaite pas) les chaussures sont la première chose que les secours regarderont. Se fracasser sur un névé en tennis peut poser des soucis en matière d’assurance.
Secundo : le chaussant
Autrement dit, le confort
Un « bon chaussant » est fondamental au même titre que la sécurité tant il est impensable de randonner avec des chaussures qui font mal. Le chaussant est la conjugaison de plusieurs facteurs dont les deux principaux sont la pointure et la largeur.
La pointure de votre chaussure de randonnée :
Chaque fabricant ayant son mode de mesure, la pointure est un joyeux bazar. Certaines taillent large, d’autres petit. De fait il importe de ne pas se fier aveuglement à sa pointure de ville et de repartir le carton sous le bras sans les avoir essayées.
D’entrée de jeu, prendre une pointure de plus.
On doit pouvoir glisser un doigt entre la chaussure et votre tendon d’Achille.
S’asseoir, bien caler le talon et serrer les lacets. Le gros orteil ne doit pas toucher devant sinon à la descente, il viendra buter et c’est l’ongle bleu assuré. Douloureux sauf à les percer.
La largeur :
Le critère est souvent méconnu. Et pourtant !
De nombreuses personnes ignorent que les chaussures peuvent, en plus des différentes pointures, être proposées en différentes largeurs. Si le pied est à l’étroit, il va s’enflammer et une belle ampoule va éclore au niveau de l’articulation du gros orteil. Difficile à soigner en rando. Le stade ultime étant l’Hallus valgus qu’il faut opérer.
Les parties de la chaussure
La chaussure comprend différentes parties qu’il est intéressant de connaître. Chacune a son importance. Les connaître permet de poser aux vendeurs les bonnes questions pertinentes ou de ne pas se laisser piéger par les offres alléchantes d’Internet.
L’épaisseur de la semelle :
Elle doit être conséquente afin que la plante des pieds ne soit pas en contact direct avec les pierres du chemin. De sinistre mémoire, pendant la guerre d’Algérie, les tortionnaires pratiquaient la « falaqa » véritable délice consistant à bastonner la plante des pieds jusqu’à l’apparition d’œdèmes.
Une journée de pierrier avec des semelles fines produit le même effet.
Le crantage
Les dessins sous la semelle ont leur importance. Le « lisse » à vocation d’adhérer sur les rochers alors que le « crantage » est plutôt destiné à ne pas partir en vrille dans la boue et sur la neige.
Le contrefort du talon
Il faut vérifier la présence d’un contrefort. Son rôle est essentiel pour le maintien du pied dans l’axe de la chaussure. À défaut de contrefort, le talon glissera de gauche à droite, donnant au mieux une impression d’insécurité et de mauvaise tenue sur terrain accidenté. Au pire une grosse ampoule sous le talon, insoignable en randonnée. Pour évaluer la rigide du contrefort, il faut pincer fortement le talon de la chaussure. Certaines en sont dépourvues. Les reposer sur l’étagère.
La tige :
Elle peut être basse, haute ou demi haute.
On pourrait à priori penser que les tiges hautes sont destinées aux parcours accidentés. C’est vrai. Mais ce serait sans compter sans la psychologie du randonneur n’ayant pas confiance dans ses chevilles. Les tiges hautes donnent un sentiment de primant sur tous les autres choix.
En rando étoile ou itinérance facile sur sentier avec portage de bagage, des tiges basses ou demi hautes conviennent.
Deux points de vigilance pour les tiges hautes et demi-hautes. La malléole qui est l’endroit où viennent s’insérer les os de la cheville ne doit pas blesser. Vérifier également la présence de crochets bloqueurs permettant de lacer de façon différenciée le bas et le haut de la chaussure ainsi que maintenir le coup de pied.
Dans la perspective de pratiquer la haute montagne hors sentier et sur névés, choisir sans coup férir les tiges hautes. Pour Saint-Jacques de Compostelle, tiges basses ou demi hautes, ça se discute !
Certaines tiges sont construites en plusieurs morceaux cousus en ensemble. Ces coutures sont des points de fragilité devant être protégées par un pare-pierre. À défaut, une petite descente dans les éboulis et ciao les chaussures !
Les chaussures cuir haut de gamme sont construites d’une seule pièce.
Le pare-pierre :
Il se présente sous la forme d’une bande résistante cerclant la chaussure au-dessus de la semelle. Il assure la longévité des chaussures cousues en empêchant les pierres tranchante de venir abimer les coutures. Le pare-pierre protège également de la rosée.
Toutes les chaussures n’en sont pas pourvues. Les modèles cousus sans pare-pierre, ne font en général pas long feu.
Souvent le pare-pierre enrobe le bout de la chaussure. C’est bien et pas nouveau. Les montagnards d’antan protégeaient le bout de leurs chaussures avec de la colle Araldite.
Autres critères pour choisir ses chaussures de rando
Le poids :
Il résulte de toute de la façon dont la chaussure a été conçue. Les chaussures légères sont à la longue plus agréables à porter.
Le maintien :
Un bon maintien est la résultante d’une chaussure adaptée à votre pied, avec une tige haute, qui vient soutenir l’articulation de la cheville et le bas du tibia.
La nervosité de la semelle :
Elle est essentielle pour la tenue du pied et l’accroche en terrain montagneux.
Pour l’apprécier, il faut vriller la semelle en la saisissant au talon et à pointe.
Sur la neige moyennement dure, une semelle nerveuse permet de tailler de petites marches en tapant avec le bout du pied.
La rigidité :
C’est la souplesse de la chaussure dans le sens de la marche. Elle se produit au niveau du cambrion et de la voûte plantaire. Une chaussure souple assure un bon déroulé du pied. Trop souple, elle ne permet pas de chausser les crampons. Les godillots de haute montagne sont en général rigides. Pour pallier à cet inconvénient est apparu le concept des chaussures d’approche avec tige basse et semelle assez rigide et sécurisante, le marketing n’arrête pas le progrès.
L’accroche de la semelle :
A déjà été évoqué avec le Vibram. À savoir que les gommes tendres ont une meilleure accroche sur le rocher, mais elles s’usent vite.
L’imperméabilité :
Bien tenir la pluie et une affaire de matière employée, mais pas que... Le plus souvent une couche de tissu imperméable, mais respirante type est insérée en sandwich dans la tige. Il est bon de savoir que la pluie pénétre souvent par le haut et que le port de guêtres ou de stop-tout est le meilleur moyen d’y remédier. L’eau pénètre également par capillarité par les chaussettes. Souvent l’humidité intérieure est produite par la condensation.
Et enfin le look…
Il a son importance. Conscients que c’est un argument du choix prévalant sur toute considération d’ordre technique, les fabricants rivalisent d’inventivité dans ce domaine.
Pour bien choisir : glaner des conseils pertinents
Surtout ne pas se fier aux dires du copain ou de la copine.
La chaussure dont ils vous vantent les mérites peut tout à fait ne pas être adaptée à votre pied ou votre façon de marcher.
Si vous êtes en rando avec un accompagnateur et que l’achat est lointain, demandez-lui conseil. Vous voyant marcher au quotidien, il est le plus à même de vous conseiller.
Un brin d'histoire
La Préhistoire
Un siècle nous sépare des premières chaussures de montagne dignes de ce nom. Il est loin le temps des « tricouni » (que j’ai connu). Aux alentours des années 1900, un bijoutier suisse du nom de Felix Valentin Genecand, surnommé Tricouni, invente un système de clous fixés sur le pourtour des chaussures auquel il donnera son nom ou plutôt son surnom. Sa réputation est telle qu’en Antarctique une chaîne de montagne est appelée en son honneur, les Monts Tricounis.
Quel chemin parcouru !
La révolution des semelles Vibram :
Vibram est la contraction du nom de son inventeur Vitale Bramani guide italien et dans le civil fabriquant de tuyau d’irrigation. Dans les années 30, six de ses amis chaussés de simples brodequins dévissent mortellement. Terriblement affecté, il se rapproche de Leopoldo Pirelli célèbre fabricant de pneus et mettent ensemble au point une semelle de caoutchouc vulcanisée et crantée.
Son trait de génie sera de sponsoriser en 1954 l’expédition qui vaincra le K2 (8611m). Surnommé la « montagne sans pitié », c’est le deuxième sommet du monde après l’Everest et le point culminant du Pakistan. Cette victoire chargée de symbolique, nationalisme italien propulsera la réputation des Vibram au firmament de la gloire et vaudra au K2 son autre surnom de “montagna degli italiani”. Les Vibram, les vraies, se distinguent entre toutes grâce à un logo jaune en forme de pastille Vichy. Astuce de vieux montagnard : passer un petit coup de verre pour les rendre plus adhérents.
Ne pas faire de la fixette sur les Vibram. Aujourd’hui, de nouvelles matières tout aussi performantes ont fait leur apparition.
Les tendances actuelles des chaussures de randonnée :
L’observation des pratiques conduit à penser que la « randonnée » tend à se scinder en deux activités différentes. D’un côté la randonnée à la journée petite ou grande et de l’autre le trek sur plusieurs jours avec sac à dos.
Anticipant sur cette évolution, certains distributeurs proposent déjà des rayons différents pour ne pas mélanger les genres, notamment les chaussures.
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Accompagnateur en montagne et écrivain pyrénéiste